– une erreur exprimée : le
piano sur lequel ils jouaient ensemble se trouvait moins souvent
à Lyon qu’à Valence, où Joseph Jaillard a
longtemps été en garnison au 6e
régiment d’artillerie (1877-1878, 1882-1891, 1893-1896)
; – une erreur suggérée
: ils le faisaient bien avant que Joseph Jaillard ne connaisse celle
par qui ils allaient devenir cousins à la mode de Bretagne par
alliance, le père de celle-ci et celui de Vincent d’Indy
étant cousins hermets de germains. Diverses sources permettent en outre
de compléter le portrait esquissé par sa fille Louise
[Lison] de Raucourt (" Souvenirs ! Souvenirs ! ", in
la Gazette de l’île
Barbe, n° 43, p. 8-16, et
n° 44, p. 6-14) et par diverses publications de la Gazette de l’île Barbe, ici rappelées. Joseph Jaillard tint garnison à
Lyon, Valence, Clermont-Ferrand, Angoulême. Brimé comme
bien d’autres pour ses opinions religieuses sous les
ministères anticléricaux du début du
siècle, il termina sa carrière comme chef d’escadron.
Bon musicien, il réunit dans toutes ses garnisons un orchestre
de chambre et était aussi amateur d’orgue. Il périt
dans la catastrophe ferroviaire de Melun avec son fils Charles
entrant à l’École militaire de Saint-Cyr. Henri Jaillard. Les Familles Jaillard et
Neyrat, Caluire-et-Cuire, 1965,
note 16, p. 52. Officier d’artillerie de son
activité principale, notre bisaïeul Joseph Jaillard avait
pourtant fini par quitter cette carrière, alors qu’il ne
perdit jamais son inclination pour la musique. Cette dernière
activité, multiforme et parfois anonyme, est aujourd’hui
méconnue de ses descendants, mais un fonds d’archives
conservé par André Jaillard permet de la
reconstituer. Joseph peut avoir pris goût
à la musique auprès de son oncle Stanislas Neyrat, dont
il était assez proche pour l’accompagner en voyage dès
sa jeunesse, et qui était un grand musicien, maître de
chapelle, organiste et compositeur (cf. Pierre Jaillard,
" voyages de Monseigneur Neyrat ", in la Gazette de l’île Barbe,
n° 24, p.15-16). Sans
doute composa-t-il lui-même : il conservait un programme de
concert manuscrit du 28 avril 1876, peu après son
19e anniversaire, annonçant une romance pour
flûte et des rhapsodies pour piano attribuées à
" J.J. ", alors que les autres compositeurs sont
explicitement cités… Il jouait en tout cas assez bien du piano
et de l’orgue pour se produire en concert avec les exécutants
qu’il réunissait dans chacune de ses garnisons, et pour
être nommé organiste titulaire d’églises de
villes où il séjournait. Engagé conditionnel pour un an,
à 20 ans (2 novembre 1877, Lyon IIe),
comme cannonier de 2e
classe, il passa son année conditionnelle au
6e régiment d’artillerie à Valence,
et fut mis un an plus tard à la disposition de l’armée
active (8 novembre 1878), affecté au 38e
régiment d’artillerie de Lyon (28 novembre 1878), et promu
brigadier (30 novembre 1878). Habitant 1, rue Vaubecour à
Lyon, il était alors qualifié d’étudiant et de
catholique, et décrit physiquement ainsi : " cheveux et
sourcils châtain foncé, yeux châtains, front
étroit, nez moyen, bouche moyenne, menton rond, visage ovale,
taille : 1,76 m. " Il resta trois ans et trois mois en garnison
à Lyon, pendant lesquels il fut promu maréchal des
logis (26 avril 1879), grade dans lequel il exerça quelques
mois les fonctions de fourrier (15 août 1879 – 9 janvier
1880). Joseph Jaillard retourna ensuite au
6e régiment d’artillerie à Valence
pour y prendre ses premiers galons d’officier, comme sous-lieutenant
(5 février 1882), puis comme lieutenant en second (5
février 1884) et comme lieutenant en premier (15 août
1886). Il y resta neuf ans. Ce fut pendant cette période
que, à 26 ans, il épousa Louise Laprade,
âgée de 21 ans, et qu’il la perdit en couches trois ans
après. Fille unique de feu M. Laprade (mort en 1871, alors
qu’elle avait 8 à 9 ans) et de Mme Laprade née Bonnet,
" d’excellente réputation ", Louise vivait chez sa
mère, 7, place Perrache à Lyon, bien que la famille
fût originaire d’Ambérieu-en-Bugey. Dotée de Ce fut sans doute aussi en
préparant des concerts à Valence qu’il se lia
d’amitié avec Vincent d’Indy, Cévenol de six ans son
aîné. Le 25 mai 1883 en effet (ils avaient 26 et 32
ans), ils se produisaient au théâtre de Valence pour le
Cercle de l’Union, Joseph à l’orgue et Vincent au piano, et
ensemble pour deux des dix-sept morceaux au programme : la
sérénade pour piano, flûte, violon, violoncelle
et orgue de Charles-Marie Widor, et une transcription pour piano,
orgue, violon et violoncelle du menuet de la symphonie en
ré de Joseph Haydn. Ces deux morceaux se
retrouvèrent au programme d’un concert privé,
organisé bénévolement par un groupe d’amateurs
parmi lesquels il est difficile de ne pas imaginer Joseph Jaillard
bien qu’il fût alors en garnison à Valence, le 29 avril
1885 à la salle philharmonique de Lyon (30, quai
Saint-Antoine), au profit de l’enseignement du chant, du plain-chant
et de la musique dans les écoles catholiques de Lyon, dont
certains frais accessoires étaient en dehors du budget
général. Cette soirée obtint un succès
suffisant pour financer ces dépenses pendant toute une
année scolaire. La presse locale remarqua notamment " une
barcarolle d’un jeune compositeur lyonnais, M. Gabriel Fabre ",
et la sérénade de Saint-Saëns, qui fut
redemandée dans un nouveau concert donné le 5
février 1886 par " la même réunion
artistique " et pour la même cause. Mais Louise mourut en couches le
1er décembre 1886, sans laisser aucun
enfant. Joseph en resta longtemps inconsolé. En 1889 et 1890,
il repoussait comme importuns des projets de remariage
présentés par son père. Plus tard, finalement
remarié, il conserva des relations affectueuses avec sa
première belle-mère, " bonne-maman Laprade ",
qui accueillait à Ambérieu-en-Bugey sa nouvelle famille
en vacances. Il consacra alors ses loisirs
d’officier à l’organisation de concerts. La
sérénade de Saint-Saëns, jouée en 1885
à Lyon, se retrouva au programme du Cercle musical et
artistique de Valence le dimanche 8 mai 1887. Ce Cercle donna
d’autres concerts le 20 décembre 1887 au théâtre,
le 7 février 1888 à l’hôtel de la Croix-d’Or, le
3 mars 1888 dans les salons du Cercle… Le 24 avril 1888, il donna au
théâtre un " concert gastronomique de fin
d’année offert par la fanfare de la Casserole de Valence et la
société philharmonique "la Poule nantaise", avec le
bienveillant concours de Mme Petite-Marmite, de MM. Jaillard et
Delorme, et de plusieurs artistes distingués ". Joseph
Jaillard participait avec Mme Couchon à l’exécution
d’un arrangement pour piano à quatre mains des Saisons (Été, Automne)
de Joseph Haydn. À la création de la
Société de musique classique de Valence, en 1889,
Vincent d’Indy avait acquis sa renommée de compositeur,
notamment depuis sa Symphonie
sur un chant montagnard français de 1886. Il dirigeait auprès de
César Franck la Société nationale de musique,
ainsi présentée dans un programme de la
Société de Valence du 9 novembre 1890 :
" Fondée en 1871 par MM. Saint-Saëns et Romain
Bussière pour favoriser le développement de la musique
française et permettre aux jeunes compositeurs de faire
entendre leurs œuvres, la Société nationale a vu se
grouper auprès d’elle bien des célébrités
: MM. Lalo, G. Bizet, A. de Castillon, G. Fauré, H. Duparc, E.
Chabrier, V. d’Indy et tant d’autres habilement dirigés par C.
Franck. "Là, C. Franck est dieu et V. d’Indy est son
prophète" a écrit un critique, peu bienveillant
peut-être, mais qui certainement ne croyait pas si bien dire,
tant il est difficile d’exprimer autrement la respectueuse et
sincère amitié qui lie à l’autre le plus jeune
de ces maîtres. Cette vaillante Société a
donné depuis sa fondation plus de sept cents premières
auditions françaises, et elle pourrait citer avec orgueil
nombre d’œuvres qui, bien avant de triompher devant le public des
grands concerts, avaient été exécutées
pour la première fois dans ses séances
intimes. " Le 16 mars 1889, Joseph alla à
Paris, salle Pleyel, Wolff et Cie (22,
rue Rochechouart), assister à un concert donné par
cette Société nationale et conclu par le trio pour
piano, clarinette et violoncelle de Vincent d’Indy,
interprété avec le concours de l’auteur — et aussi,
à cette occasion, à un concert de la
Société des concerts du Conservatoire national de
musique de Paris, le lendemain 17 mars, grande salle des concerts (2,
rue du Conservatoire). Si la Société nationale
soutenait la création, la Société de musique
classique de Valence avait pour " but, uniquement artistique, de
faire entendre les œuvres de maîtres anciens trop
oubliés et de modernes trop inconnus. Sans aucune
prétention au point de vue de l’exécution, ne cherchant
qu’à faire applaudir l’auteur de l’œuvre ainsi
présentée au public, les organisateurs de ces auditions
[avaient] l’intention de les continuer en mettant dans les programmes
une progression qui intéresse en initiant autant que possible
à l’histoire de la littérature musicale. " Leurs
programmes comprenaient donc des présentations historiques,
mais aussi, suivant l’usage anglais introduit en France vers 1887 par
la Société des concerts du Conservatoire de Paris, des
analyses des œuvres. Créée le 14 avril 1889,
la Société de Valence s’honora de recevoir Vincent
d’Indy pour les deux derniers concerts de cette saison, les 29 et 30
juin 1889, présentant chronologiquement " les grands noms
de l’histoire de la musique ", articulés autour de
Beethoven et parmi lesquels il figurait lui-même avec deux
morceaux. Il revint le 17 novembre 1889, profitant de ce concert pour
créer deux pièces extraites des Tableaux de voyage, puis le 25 juillet 1890, au piano, pour un
concert autour des trois manières de Beethoven, et le 9
novembre 1890, pour un concert de musique française moderne,
où " [sa] présence a fait pencher la balance du
côté de l’école Franck. " La
Société de Valence donna ainsi neuf " auditions de
vraie musique " en 1889 et huit en 1890. " Organisés
suivant un certain plan, ces concerts sont cependant loin de
constituer un tout ; ils présentent bien plutôt le cadre
d’un projet seulement ébauché. " La
carrière militaire de Joseph le contraignit alors à
laisser poursuivre ce projet par d’autres, parmi lesquels son ami M.
Casagrande, avec qui il continua longtemps à se retrouver pour
" musiquer ". Cinq ans après son veuvage, sa
carrière l’éloigna en effet quelques mois de la
vallée du Rhône. Nommé capitaine en second, il
occupa ce grade comme adjoint à l’atelier de construction du
10e régiment d’artillerie à Rennes
(27 février 1891), puis au 2e
régiment d’artillerie à Clermont-Ferrand (division de
Lyon, 13 juillet 1891), au 16e
régiment d’artillerie (4 octobre 1891) et au
19e régiment d’artillerie (3 août
1893). Sans doute enhardi par sa participation
à la rédaction des programmes de la
Société de musique classique de Valence, il venait de
se proposer comme correspondant lyonnais du Guide musical, Revue internationale des
théâtres et de la musique, édité à Bruxelles, sous
réserve d’un anonymat garanti par le pseudonyme
" J.B. " Le directeur et depuis peu seul
propriétaire, Maurice Kufferath, l’agréa le 28
février 1891, " certain que [leurs] idées et
[leurs] sentiments concordent sur bien des points et qu’en ce qui
concerne la jeune école française, si vivace et si
active, [Joseph partage] l’admiration que [lui-même]
éprouve pour elle. " Joseph admirait en effet la musique
française moderne, alors prédominante et dont Vincent
d’Indy était un des meilleurs guides, comme en témoigne
sa correspondance avec lui, mais plus encore Jean-Philippe Rameau,
Jean-Sébastien Bach, Ludwig Van Beethoven, Richard Wagner,
Niels Gade, seuls personnages historiques cités dans son
éphéméride de 1896 avec Jeanne d’Arc. En 1889
à Bayreuth, il avait assisté avec ses amis valentinois
M. Bergane et Jean de la Laurencie (devenu gendre de Vincent d’Indy
en 1896) à Tristan et
Isolde le 5 août, aux
Maîtres chanteurs de
Nuremberg le 7 et à
Parsifal le 8, dirigés par Hans Richter.
En mars 1892, le compte rendu d’un
concert de la Société des concerts du conservatoire de
Lyon indigna le chef d’orchestre, M. Luigini, qui adressa au
Guide musical une longue lettre, " un peu diffuse "
et très polémique, excipant des " traditions de la
Société des concerts du Conservatoire de Paris "
pour humilier un critique supposé " jeune,
peut-être même très jeune, professant le culte de
la musique, bien doué probablement, mais [se] laissant aller
au grave défaut de la jeunesse qui consiste à
n’admettre comme traditions que celles qu’elle se met en tête
en exécutant au piano, tant bien que mal, les œuvres des
grands maîtres. " Âgé de presque 35 ans mais
toujours anonyme, Joseph répondit diplomatiquement que,
" persuadé que la critique qui loue sans restriction est
de peu de poids auprès d’un homme de valeur, [il avait]
franchement indiqué les imperfections signalées par
quelques auditeurs, transcrivant ainsi, non pas une opinion
personnelle, mais bien celle de véritables artistes, et non
des moins autorisés. " Il ajouta cependant à
l’intention de son directeur, qui ne paraissait pourtant pas en
douter : " Soyez bien persuadé que je ne vous transmets
jamais de critiques sans avoir pris l’avis de personnes
fort compétentes.
Dans le cas présent,
j’ai été cent fois au-dessous de la
vérité. Si vous aviez été là !!! –
Il faut cependant qu’un bulletin de critique ne soit pas simplement
une machine à couvrir de fleurs, comme le sont un peu trop
ceux de la presse locale, qui ne connaît que les
épithètes : admirable, merveilleux, parfait…
Je crois que tout le monde doit
y gagner. " Quelques années plus tard, en
1896, au sujet d’un colonel violoncelliste qui " [voulait] faire
de la musique " avec lui, il estimait : il " doit aimer les
traits bien faits. Moi pas. " Entre-temps, en trois mois de 1893,
Joseph avait fondé une nouvelle famille, qui prenait
désormais l’essentiel de ses loisirs. À 36 ans, il
était de retour à Lyon, comme adjoint à la
direction d’artillerie, habitant 9, rue Boissac, dans le
IIe. Le 20 mai, chez Mme Perret, place Bellecour,
on lui avait enfin présenté une jeune femme avec qui
ils s’étaient plu : Constance Goybet, âgée de 30
ans ; elle avait été fiancée à un cousin
issu de germains, Charles Goybet, mort cinq ans auparavant (cf.
Constance Jaillard-Goybet, Mes
Souvenirs, in la Gazette de l’île Barbe,
n° spécial, 1993).
Le père de Constance et celui de Vincent d’Indy étaient
cousins hermets de germains, mais probablement l’ignoraient-ils. Avec
l’autorisation du général commandant le
14e corps d’armée (5 juillet), ils
passèrent un contrat de mariage le 9 août devant
maîtres Berloty et Lombard-Morel, notaires à Lyon, et se
marièrent le 10 août à Lyon IIe.
Après un voyage de noces du 10 au 31 août en Bretagne,
ils s’installèrent quai d’Occident (actuellement quai du
Maréchal-Joffre, Lyon IIe). Dès le 26 décembre de
cette même année, Joseph retourna au 6e
régiment d’artillerie, toujours comme capitaine en second. Ses
deux fils aînés naquirent cependant à Lyon en
1894 et en 1895. Du début de 1896 à sa
mort, Joseph tint sous forme d’éphéméride un
journal que publiera la Gazette
et qui raconte ces dix-sept
dernières années mieux que nous ne saurions le
faire. Après presque trois ans de
mariage, Joseph et sa famille déménagèrent
à Clermont-Ferrand, lui étant nommé au
36e régiment d’artillerie, d’abord toujours
capitaine en second (13 mai 1896), puis capitaine en premier (2 mars
1898) et capitaine en premier, adjoint-major (30 mars 1904). Ils y
restèrent treize ans, au cours desquels naquirent leurs trois
autres enfants, deux à Clermont-Ferrand et une à Yenne
pendant les vacances chez les parents de Constance. Mais leurs deux dernières
années clermontoises furent assombries par une campagne de la
presse locale anticléricale contre Joseph, notamment en raison
de la résistance que lui et sa famille avaient opposée
le 26 janvier 1907 à l’expulsion — ensuite jugée
illégale — de l’école Massillon où
étudiaient les enfants. De plus, Joseph travaillait l’orgue
depuis mars 1897 avec M. Claussmann, organiste de la
cathédrale de Clermont-Ferrand, il le remplaçait depuis
juin 1897, et il jouait avec lui en duo, même après la
décision ministérielle de 1899 interdisant aux
officiers de se mettre en civil, qui l’amenait à se montrer en
uniforme à la tribune. Joseph fut donc soulagé
d’être nommé au 21e
régiment d’artillerie (28 août 1909) et d’emmener sa
famille à Angoulême. De capitaine en premier, il y
devint enfin chef d’escadron quelques mois après son
arrivée (24 décembre 1909). Voici comment il
était apprécié l’année suivante :
" vue normale ; santé très bonne ;
équitation : très bien ; très apte à
faire campagne (…) ; réelle valeur, rempli de zèle,
d’énergie, d’expérience et de bon sens ; cavalier
brillant et vigoureux ; a dans le commandement du coup d’œil, du
sang-froid, de la décision (…). Très bon commandant de
groupe, intelligent, actif, ayant de l’initiative et du commandement
; ses batteries sont très bien instruites et
entraînées. " (Octobre 1910.) Chef d’escadron au 52e
régiment d’artillerie (1er
janvier 1911), il continua à inspirer des appréciations
élogieuses à ses supérieurs :
" intelligent, actif, instruit, très à la hauteur,
commande très bien son groupe, obtient de très bons
résultats. Caractère froid et
pondéré. " (Colonel Meyer, avril 1911.)
" Excellent officier. A très bien commandé son
groupe aux écoles à feu et avec beaucoup d’entrain. (…)
Commande parfaitement son groupe ; énergique, vigoureux, de
beaucoup d’expérience et de bon sens, d’un beau
caractère ; brillant cavalier. " (Général
Fayolle, octobre 1911.) Lorsque, le 24 juillet 1912, il demanda
à faire valoir ses droits à une pension de retraite,
son supérieur eut cette dernière appréciation :
" Le commandant Jaillard quitte le service (8 août) en
pleine vigueur, et en possession de tous ses moyens ; excellent chef
de groupe, très apte à commander au groupe dans la
réserve ; officier de premier ordre ayant conservé tous
ses moyens intellectuels et physiques. " Admis à la
retraite comme chef d’escadron (20 novembre 1912 ; décret du
21 juin 1910), il fut donc versé dans le cadre de
réserve, au 5e
régiment d’artillerie puisqu’il était revenu à
Lyon (4 décembre 1912). La lenteur de son avancement
contrastait avec les appréciations de ses supérieurs.
Elle s’expliquait par son engagement catholique dans une
époque anticléricale, où la démission du
ministre de la Guerre en 1904 mit fin à l’affaire des Fiches
mais non à la discrimination religieuse. Dans ce contexte,
jouer en uniforme à l’orgue de la cathédrale de
Clermont-Ferrand ou être nommé organiste titulaire de
Saint-Martial d’Angoulême constituaient des provocations que
son commandement ne pouvait couvrir, quelles que fussent ses
sympathies. Ainsi, en 1899, son colonel lui infligea " par ordre
supérieur " quatre jours d’arrêts pour un accident
survenu dans sa batterie, mais ne les lui notifia que la veille au
soir du dernier jour… Retraité à Lyon, Joseph
finit aussi par accepter le 1er
novembre 1912, " après plusieurs
hésitations ", d’être nommé organiste
titulaire de Saint-Augustin de la Croix-Rousse. Il continuait
à monter tous les matins avant la messe, à jeun,
souvent accompagné par sa nièce Jeanne Rousselon,
à qui la faculté prescrivait ce sport contre
l’anémie, et qui ne s’offensait guère de ses
remontrances… Il ne profita malheureusement de sa
retraite qu’à peine un an, victime le 4 novembre 1913 de la
catastrophe ferroviaire de la gare de Melun, avec son fils cadet,
qu’il accompagnait à l’École spéciale militaire
de Saint-Cyr, où il venait d’être admis (cf. Louise de
Raucourt, " catastrophes ferroviaires en gare de Melun ",
in la Gazette de l’île
Barbe, n° 9, p.13).
Pierre
Jaillard. In La gazette de l'île Barbe n° 47
80 000 F (dont 10 000 F de trousseau et 70 000 F de valeurs
mobilières), elle pouvait en outre espérer 220 000 F
d’héritage. L’enquête militaire sur elle lui attribue
une " conduite irréprochable, [une] éducation
parfaite. " Un contrat de mariage fut passé le 7 octobre
1883 devant maîtres Vicaire, notaire à
Ambérieu-en-Bugey, et Berloty, notaire à Lyon.
Autorisé par le ministre le 24 novembre 1883, le mariage fut
célébré le 27 novembre 1883 à
Lyon.